À l’heure du réchauffement climatique et de l’épuisement des ressources, il est temps de s’interroger sur l’impact environnemental de nos activités préférées. Après vous avoir parlé des marques de vêtements écoresponsables Picture et Patagonia, nous souhaitions faire un petit bilan des progrès de l’industrie du snowboard en matière d’écoconstruction. Le snowboard est intimement lié à la nature et en est même dépendant, comme le montre la menace que présente l’évolution du climat sur la skiabilité de certaines stations. Chacun a sa part de responsabilité et la possibilité de faire changer les choses. Dans le monde du snowboard, nombreux sont ceux qui l’ont compris et qui s’appliquent à réduire leur impact environnemental. Noyaux bois certifiés FSC® (Forest Stewardship Council – label qui certifie que le bois est issue de forêts gérées durablement), résines moins toxiques, matières recyclées ou encore méthodes de fabrication novatrices, les grandes marques comme les petits nouveaux innovent pour produire des boards moins polluantes.
Mervin Made, les pionniers de la construction locale et respectueuse de l’environnement
Alors qu’une majeure partie de l’industrie de la glisse délocalise sa production en Chine, l’usine Mervin fabrique des boards depuis 1977 au Nord-Ouest des États-Unis dans l’État de Washington. Fondée par les snowboardeurs Mike Olson et Pete Saari, cette usine gère aujourd’hui l’ensemble de la chaîne de production des planches Libtech, GNU et Roxy, de la conception au produit fini. L’usine a donc le contrôle total de ses process, ce qui lui permet de développer des alternatives plus vertes pour chaque produit et étape qui composent la construction d’un snowboard.
Base de tout snowboard, le bois n’est issu que de ressources durables chez Mervin. Pour ce qui est des autres matériaux, la fibre de basalte remplace la fibre de verre, des sidewalls en élastomère obtenu à partir de soja supplantent les sidewalls ABS toxiques, et un bio-plastique à base de Ricin se substitue aux habituels plastiques dérivés du pétrole. Ces matériaux sont assemblés par une résine epoxy spécifique. Grâce à un taux de composés organiques volatils bas (Low VOC), elle est moins nocive qu’une résine epoxy traditionnelle.
D’autre part, pour décorer les planches (en utilisant notamment les travaux du célèbre snowboardeur et artiste Jamie Lynn pour les boards Libtech), l’usine Mervin n’applique aucun vernis toxique ou cancérigène. Les graphismes sont réalisés avec des encres à base d’eau.
Enfin, l’usine Mervin recycle ses déchets plastiques, transforme la sciure de bois en compost et donne les copeaux de bois pour en faire du petit bois de chauffage. Le chauffage de l’usine fonctionne quant à lui au biodiesel.
L’usine Mervin propose une visite guidée et une explication complète de ses méthodes dans la vidéo ci-dessous.
Capita Supercorp et son usine sans émission carbone
En plein cœur des alpes dans les confins des vallées autrichiennes, Capita a créé la fabrique de snowboard la plus écologique au monde : « The Mothership ». N’émettant aucun rejet de CO2, elle fonctionne intégralement grâce à deux ressources naturelles : l’eau et l’ammoniac (NH3). Ainsi, via un système complexe de chauffage/refroidissement par eau, l’ammoniac est transformé en énergie pour assurer l’ensemble des besoins du bâtiment et de la chaîne de production. L’eau, prélevée localement, est utilisée dans un circuit fermé. Elle n’entre en contact avec aucun élément chimique ou industriel, pour être ensuite restituée intacte en fin de cycle à mère nature.
Les efforts de Capita pour réduire son impact environnemental ne se limitent pas aux moyens de production. Ils s’étendent également aux matériaux et technologies utilisés pour la fabrication des boards. Ainsi, sur les 23 modèles du catalogue 2018-2019 de Capita, 18 ont un noyau bois certifié FSC®. D’autre part, tous utilisent la résine écologique Magic Bean™. Fabriquée à 60 % à partir de ressources renouvelables issues de l’agriculture, cette résine est très performante et permet de réduire l’épaisseur et le poids du noyau bois. Plus anecdotique, quelques références du catalogue utilisent des renforts en basalte et liège, deux matières naturelles et durables. Enfin, il faut savoir que 98 % des matériaux utilisés proviennent d’Autriche et de pays européens voisins, les 2 % restant étant importés d’Asie. En s’approvisionnant localement, Capita réduit les pollutions liées au transport des marchandises et supporte l’économie locale.
Pour les plus curieux, le fonctionnement complet de l’usine est détaillé dans une vidéo qui illustre à merveille le slogan de Capita : « Everything Is Possible ».
Niche Snowboards, les planches 100 % recyclables
Niche Snowboards s’est associée à la société Connora Technologies pour parvenir à produire des boards totalement recyclables, dont la fabrication n’occasionne aucun déchet. Dans toutes les usines du monde, la production d’une planche de snowboard engendre nécessairement des déchets lors de l’étape de découpe (lorsque le sandwich de matériaux est détaillé pour prendre la forme de la planche). Ces déchets finissent généralement à la décharge. Pour pallier à ce problème, Niche Snowboards propose un sandwich de matériaux 100 % recyclable et composé de bio-résines, dont les résidus post-production servent à fabriquer de nouvelles boards grâce à la technologie Recyclamine de la société Corrona. D’autre part, les carres, les chants et les semelles sont fabriqués en matériaux recyclés, les encres utilisées sont à base d’eau et sans solvants et les noyaux bois sont issus de sources durables. ! Suivant cette recette, Niche propose une petite dizaine de modèles différents, harmonisés autour d’un concept graphique aux couleurs estompées et aux tons sombres, mêlant animaux, végétaux et lignes géométriques.
La démarche de Niche Snowboards est détaillée dans une petite vidéo explicative de 3 minutes, sous-titrée en français.
Borealis Snowboards, la petite marque française qui monte
Ben Hall, un franco-anglais passionné de glisse, créé en 2013 Borealis, une marque dont l’ambition est de développer des boards performantes construites à partir d’un maximum de matières durables. Les planches de snowboard Borealis sont dotées de sobriquets originaux (Viking, Drakkar, Shaman, Artefact, …) et certaines n’ont pour habillage que la pureté d’un placage en bambou. Les autres sont équipées de topsheets en bio-plastique, matière obtenue à partir d’huile de Ricin et de fibre de Basalte. D’autre part, tous les noyaux bois viennent de plantations certifiées FSC®, les carres sont recyclées et la résine utilisée est bien moins toxique pour l’environnement et le travailleur que les résines traditionnelles. Ainsi, la résine GreenPoxy est fabriquée à partir de biomasse recyclée (huiles végétales, sciure de bois, etc) et présente un taux de composés organiques volatils bas (Low VOC). Une fois prêtes, les boards sont fartées avec la wax écologique sans fluor NZero.
Jones Snowboards, la marque engagée du légendaire Jeremy Jones
Jones est une des marques montantes du snowboard ces dernières années, et bonne nouvelle, c’est également l’une des plus engagées sur le plan environnemental. Avant de parler purement technique, sachez que Jones soutient les ONG 1 % For The Planet et Community Carbon Trees (CCT). D’autre part, Jeremy Jones, légende du freeride et créateur de Jones Snowboards, a également fondé l’ONG Protect Our Winter (POW). Celle-ci met en place des projets d’éducation, des projets communautaires et des actions de plaidoyer pour lutter contre les impacts du changement climatique et sensibiliser sur les effets de celui-ci.
Abondamment récompensées dans les rubriques tests des magazines et sites de snowboard, les boards Jones pourraient également être primées pour les efforts faits en matière d’éco-conception. Ainsi, toutes possèdent des chants ABS en plastique recyclé et des carres en acier recyclé, les topsheets sont soit en bois (frêne ou bambou en fonction des modèles) soit en bio-plastique, et les planches sont fartées avec une wax naturelle. Enfin, lorsque cela peut être fait sans perdre en performance, la fibre de lin et des renforts en basalte remplacent la fibre de verre et le carbone.
Dans son catalogue pour l’hiver 2018-2019, la marque inscrit noir sur blanc la provenance de chacun des matériaux utilisés dans ses planches. Dubaï étant l’un des plus importants points de production et d’export au monde, Jones a décidé d’y implanter son usine. Cela lui permet de s’approvisionner localement pour plus de 50 % des matériaux bruts. Si les process peuvent certainement être encore perfectionnés en matière d’impact environnemental, Jones a cependant le mérite d’être parfaitement transparente sur ses pratiques.
Burton Snowboards, leader sur le marché du snowboard et modèle du développement durable
Leader mondial du snowboard, Burton n’en est pas moins un acteur engagé qui cherche à réduire l’impact environnemental de son activité.
Concernant la fabrication des planches, tous les noyaux sont certifiés FSC® et les résines utilisées sont biologiques. D’autre part, l’usine autrichienne de la marque, qui assure la production d’environ la moitié des boards Burton, s’approvisionne pour la quasi totalité des matériaux dans un rayon de 400 kilomètres. Les chants, les chutes et les matériaux de base sont recyclés, tandis que l’eau est réutilisée en circuit fermé. L’énergie approvisionnant l’usine est d’ailleurs issue à 100 % de sources renouvelables. De plus, pour 2020, l’objectif de Burton est de réduire de 20 % les émissions de carbone liées à la production de son matériel, et d’emballer l’intégralité de ses produits avec des matériaux recyclables ou compostables.
Les efforts de Burton ne se limitent pas aux usines de production. Au contraire, ils s’étalent sur tous les plans de l’activité, à l’image de la modernité du siège social de la marque. Mise à disposition de vélos et parcelles de jardinage pour les employés, panneaux solaires sur le toit, réduction des déchets, ou encore facilités de parking pour les covoitureurs : Burton semble mettre en place une démarche de Responsabilité Sociale de l’Entreprise presque exemplaire. Un gros travail est également réalisé sur le plan social, notamment au niveau des conditions de travail des ouvriers ou de la place des femmes dans l’entreprise.
Dans la vidéo ci-dessous, Donna Carpenter, la directrice générale de la marque, explique la philosophie de Burton en matière de développement durable.
Nitro Snowboards, l’autre géant qui diminue son impact environnemental
Actuellement, la marque Nitro Snowboards fait déjà de nombreux efforts pour produire ses boards de manière plus écologique. La marque utilise des noyaux bois certifiés FSC®, 85 % des semelles des boards sont faites en matériaux recyclés, et des encres à base d’eau et sans solvants sont utilisés pour décorer plus de 70 % des topsheets et 30 % des semelles (en sachant que 15 % des semelles ne contiennent pas d’encre). Enfin, 70 % des planches sont couvertes avec un vernis sans solvant et sans composés organiques volatiles (VOC) ou ne sont pas recouvertes. Pour les noyaux bois durables, pour les matériaux recyclés, comme pour les substances non-toxiques, l’objectif de Nitro est d’atteindre progressivement les 100 %.
D’autre part, Nitro réfléchit à l’approvisionnement énergétique de son usine. Ainsi, des économies de ressources et d’énergie sont réalisées en chauffant les presses à l’eau plutôt qu’à l’huile ou a l’électricité, et en faisant tourner les système d’affûtage en circuit d’eau fermé. Un projet de panneaux photovoltaïques sur le toit de l’usine est également en court. Il permettra d’avoir une complète autonomie énergétique.
Enfin, Nitro s’investit également dans différents projets sociaux et environnementaux, avec l’ONG L1fe Foundation qu’elle a créée, l’ONG suisse MyClimate ou encore la plateforme I PLANT A TREE qui mène des projets de reforestation.